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Entretien
Contenu archivé le 2024-04-18

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Un pas de plus vers un médicament homologué contre la kératite à Acanthamoeba

La kératite à Acanthamoeba (KA) est une maladie relativement peu connue qui affecte moins de 0,1 habitant de l'UE sur 10 000. Des preuves suggèrent cependant que son incidence augmente. Ce marché est trop restreint pour les entreprises pharmaceutiques, mais un consortium financé par l'UE a pu conclure avec succès un essai clinique de phase I sur l'utilisation du PHMB pour traiter la KA, ce qui permettrait d'éviter une cécité ou une déficience visuelle chez les patients atteints.

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Les acanthamoeba sont des protozoaires dont le cycle de vie comporte deux étapes principales: sous forme de trophozoïte et sous forme de kyste. Alors que la première est sensible à la plupart des agents chimiothérapeutiques disponibles, la seconde est une forme dormante capable de survivre dans des conditions extrêmement défavorables. Les personnes portant des lentilles de contact sont particulièrement concernées par cette menace: elles représentent jusqu'à 85 % des cas de kératite à Acanthamoeba (KA) et présentent souvent des taux d'infection plus élevés. Mais il y a un espoir. En 2007, la SIFI (Società Industria Farmaceutica Italiana) a obtenu une désignation de médicament orphelin pour le PHMB, un polymère antimicrobien, afin de traiter la KA. La mise au point du médicament avait été retardée en raison d'une analyse coût/bénéfice démontrant la difficulté d'entreprendre des activités de recherche préclinique et clinique. Cependant, dans le cadre du projet ODAK (Orphan Drug for Acanthamoeba Keratitis), un financement de la CE a permis à l'entreprise et à cinq organisations européennes d'investir dans des essais cliniques. En quoi consiste le projet ODAK? Antonino Asero: ODAK est un projet dirigé par SIFI qui mobilise le nombre d'experts industriels et universitaires suffisant pour développer et optimiser une approche thérapeutique utilisant le PHMB afin de remédier aux graves conséquences de la KA sur la santé et la qualité de vie des patients. Qu'est-ce que le PHMB et comment permet-il de traiter cette maladie? Cela fait plus de 60 ans que le PHMB (Polyhexaméthylene biguanide hydrochloride) est utilisé comme agent antimicrobien. Du fait du large spectre de son activité antimicrobienne, il est utilisé comme désinfectant et antiseptique dans les piscines, l'industrie cosmétique, les solutions pour lentilles de contact et de gouttes ophtalmiques, les pansements chirurgicaux et non chirurgicaux, ainsi que dans l'industrie alimentaire. Le PHMB fonctionne en se liant à la membrane cellulaire, ce qui entraîne des réactions complexes altérant l'intégrité de la paroi. Cette interaction avec la membrane cytoplasmique se traduit par une perte de composants cellulaires et l'inhibition des enzymes respiratoires. Cela permet l'entrée du PHMB, qui produit une réduction de la résistance de la paroi, puis la mort de l'organisme. Au début des années 1990, le Moorfields Eye Hospital et l'Institut d'ophtalmologie ont mené une étude novatrice sur l'utilisation du PHMB pour traiter la KA. Il est depuis utilisé dans le monde entier pour traiter cette maladie, mais sans avoir été homologué. Les données font apparaître que l'utilisation du PHMB en monothérapie présente un bon rapport risque-bénéfice et qu'il s'agit d'un candidat valide pour une demande d'autorisation d'un nouveau médicament. Quels sont les principaux problèmes que vous avez rencontrés au cours de ce projet et comment les avez-vous surmontés? Nous avons rencontré plusieurs obstacles techniques au cours du développement du projet. Le plus épineux consistait à disposer d'un approvisionnement constant et continu en PHMB. Un autre obstacle difficile à surmonter a été la mise au point d'une méthode analytique appropriée pour étudier la pharmacocinétique du PHMB dans des matrices biologiques. Heureusement, des négociations avec le fabricant nous ont permis de résoudre le problème de l'approvisionnement en PHMB. La pharmacocinétique a quant à elle été abordée par le biais de plusieurs études analytiques. Une récente publication scientifique a été très utile pour démontrer les difficultés intrinsèques liées à la détection de la molécule de PHMB à de faibles doses dans les tissus animaux. Quels sont selon vous les résultats les plus notables du projet à ce jour? A-t-il répondu à vos attentes initiales? Après avoir résolu les principaux obstacles techniques, les résultats positifs des travaux précliniques nous ont permis de démarrer et de mener à bien une étude clinique de phase I d'une solution ophtalmique de PHMB avec trois niveaux de dose (0,04 %, 0,06 % et 0,08 %). L'étude multicentrique de phase I à double insu, en groupes parallèles et contrôlée par placebo a été réalisée sur 90 volontaires en bonne santé. Elle a montré que les gouttes ophtalmiques à 0,08 % de PHMB sont sûres et pourraient faire l'objet d'une étude de phase III impliquant des patients atteints de KA. Ces résultats ont répondu à nos attentes pour ce qui est de la sélection d'une concentration sûre de PHMB utilisable chez les humains. Que reste-t-il encore à accomplir avant la fin du projet? L'étude clinique de phase 3 a démarré en août 2017 sur le premier site d'essai clinique au Moorfields Eye Hospital, à Londres. Cette étude évaluera l'efficacité, l'innocuité et la tolérance d'une solution ophtalmique à 0,08 % de PHMB chez 130 sujets atteints de KA. Au Royaume-Uni, d'autres sites devraient suivre rapidement à Manchester et Southampton et des sites d'essai en Italie (Milan et Venise) et en Pologne (Katowice) devraient procéder à un recrutement en septembre 2017. À l'issue de l'étude, SIFI demandera à l'AEM une autorisation de mise sur le marché puis, si elle est accordée, débutera la commercialisation du médicament. Le projet fournit également des directives et des informations sur la prévention, le diagnostic et le traitement de cette maladie. Actuellement, la KA est souvent diagnostiquée à tort chez les porteurs de lentilles de contact, mais un diagnostic précoce est essentiel pour assurer le traitement approprié. Souvent, lorsque la KA est diagnostiquée par erreur comme étant une kératite herpétique, on administre au patient des corticostéroïdes topiques. Cela risque malheureusement d'aggraver les symptômes et de rendre le traitement plus difficile. Si tout se déroule selon vos plans, quand pensez-vous que le nouveau traitement sera commercialisé? Notre ambition est d'améliorer les taux de résolution clinique grâce à un diagnostic précoce et précis et à un régime médicamenteux efficace. Nous voulons atteindre cet objectif aussi vite que possible. Le calendrier actuel fait apparaître que le dossier d'autorisation de mise sur le marché pourra être déposé au premier trimestre de 2020 et que l'homologation sera rapidement suivie de la commercialisation. À plus court terme, nous allons finaliser nos directives sur le diagnostic et la prévention de la maladie au cours des prochains mois. ODAK Financé au titre de FP7-HEALTH. Site web du projet Page web CORDIS

Pays

France

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