Un cœur qui bat sur une puce pour accélérer le développement de médicaments
Le développement de médicaments est une tâche fastidieuse et onéreuse. La durée moyenne nécessaire au développement d’un nouveau médicament est de 12 ans, et son coût se chiffre en milliards d’euros. Les essais peuvent provoquer des effets secondaires indésirables chez les patients humains et les animaux, et de nombreux médicaments finissent également par ne pas convenir: moins de 1 % des médicaments candidats initialement étudiés arrivent sur le marché. «Plus l’échec du test se produit tardivement dans le processus de découverte de médicaments, plus le gaspillage de l’investissement est important en termes d’argent, de temps et de sécurité humaine», explique Roberta Visone, directrice de l’exploitation chez BiomimX(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre). La PME italienne BiomimX a créé une nouvelle solution particulièrement efficace sous la forme d’un cœur battant sur une puce. Ce cœur réagit aux médicaments comme le ferait un cœur humain, ce qui permet aux chercheurs et aux sociétés biopharmaceutiques d’effectuer des tests de toxicité sur les nouveaux médicaments, accélérant ainsi leur développement. Grâce au projet uHeart, financé par l’UE, l’entreprise a jeté les bases de la commercialisation du produit. «Ces “cœurs qui battent sur une puce” sont capables à ce stade de réagir à un médicament comme le ferait un cœur humain», explique Mme Visone.
Un entraînement mécanique fait battre le cœur
La technologie brevetée uBeat™ propose des structures cellulaires en 3D dans le cadre d’une stimulation mécanique contrôlable. Cet entraînement mécanique ressemble au battement du cœur humain et apprend au cœur in vitro à battre comme le ferait un cœur naturel. Cela permet aux chercheurs d’évaluer précisément comment un cœur humain fonctionnel réagirait à certains médicaments, ce qui donne des niveaux de précision et d’exactitude sans précédent. «uBeat™ nous permet de générer des modèles prédictifs d’organes humains et de pathologies qui fournissent des informations inestimables, et aussi de planifier des essais cliniques plus intelligents», ajoute Mme Visone. Pour produire ce cœur, la technologie utilise des cellules souches pluripotentes induites(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre) humaines. La mécanique des battements permet de générer un tissu cardiaque humain et des battements réalistes en l’espace d’une semaine. À chaque battement de cœur, des impulsions électriques traversent les tissus, entraînant la contraction des cellules cardiaques et la déformation mécanique de la matrice extracellulaire. uHeart est également capable de détecter en ligne ces signaux électriques grâce à une deuxième technologie brevetée (uECG), et de surveiller en temps réel les modifications électrophysiologiques induites par les médicaments.
Un vibrant succès
Pour commercialiser uHeart comme prédicteur de la cardiotoxicité, l’équipe travaille actuellement sur deux aspects: la production industrielle du dispositif pour répondre aux critères d’automatisation et de débit exigés par les entreprises pharmaceutiques; et la validation pharmacologique pour prouver la capacité supérieure de uHeart à prédire l’effet cardiotoxique par rapport aux modèles in vitro et aux études animales déjà disponibles. «Ces deux étapes sont en cours grâce à des collaborations stratégiques actives», note Mme Visone. Le projet a permis de confirmer que le dispositif uHeart réagit aux médicaments de manière reproductible et précise comme le ferait le tissu cardiaque humain. «Cela a été confirmé en testant des composés cardiotoxiques connus dans uHeart et en détectant la modification fonctionnelle attendue de l’activité électrophysiologique», explique Mme Visone. Outre l’industrialisation et la validation pharmacologique de uHeart, l’équipe se concentre également sur son application dans la médecine de précision. «uHeart est en effet un outil idéal pour modéliser des pathologies cardiaques spécifiques avec une résolution potentiellement unique pour chaque patient, ouvrant ainsi la voie à l’expérimentation de traitements spécifiques aux patients», explique Mme Visone. La société élargit également son portefeuille pour modéliser différents organes et maladies. La stimulation mécanique est en effet essentielle non seulement pour améliorer la maturation des tissus cardiaques, mais aussi pour imiter fidèlement in vitro tout état tissulaire ou pathologique dans lequel la modification du microenvironnement mécanique exerce une réponse physiopathologique. uKnee, un autre modèle se trouvant au même niveau de développement et également basé sur la technologie uBeat, est le premier modèle in vitro d’ostéoarthrite humaine. Des modèles de l’intestin, des poumons, des dents et même des circuits neuromusculaires sont également en préparation.