Protéines désordonnées et maladie de Parkinson
De la construction des tissus au transport des molécules, les protéines sont les bêtes de somme du corps humain. Si toutes les protéines jouent un rôle crucial dans l’organisation de l’organisme, toutes ne sont pas organisées. En fait, certaines sont intrinsèquement désorganisées. «Les régions protéiques intrinsèquement désordonnées (IDR) sont des segments d’une protéine qui n’ont pas de structure tridimensionnelle stable et définie, mais plutôt une collection de conformations dynamiques», explique Alfonso De Simone, chercheur à l’Université de Naples Federico II(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre). Mais ne vous laissez pas tromper par leur désorganisation. En effet, parce qu’elles peuvent facilement changer de forme et adopter différentes structures, les IDR jouent de nombreux rôles importants. Toutefois, cette même flexibilité rend les IDR vulnérables aux erreurs, à savoir le mauvais repliement et l’agrégation, qui ont été associés à plusieurs maladies neurodégénératives et même au cancer. Le défi consiste à comprendre pourquoi certaines IDR fonctionnent et d’autres pas. «Même avec les techniques avancées de microscopie électronique et d’autres technologies permettant d’étudier les structures moléculaires, il reste pratiquement impossible d’étudier les régions désordonnées des protéines, en particulier dans le contexte des membranes cellulaires», ajoute Alfonso De Simone. Mais cela pourrait bientôt changer, notamment grâce aux travaux réalisés dans le cadre du projet BioDisOrder(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre) financé par l’UE.
Étude du processus d’agrégation de l’alpha-synucléine – du début à la fin
Le projet, qui a reçu le soutien du Conseil européen de la recherche(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre), a développé plusieurs outils innovants qui utilisent une combinaison de spectroscopie par résonance magnétique nucléaire et de simulations moléculaires multi-échelles. Grâce à ces outils, les chercheurs ont pu étudier le processus complet d’agrégation de l’alpha-synucléine (aSyn), une IDR dont l’agrégation est liée à la maladie de Parkinson (MP). «En décrivant, avec une précision sans précédent, les mécanismes à l’origine de la maladie de Parkinson, notre travail ouvre la voie au développement de thérapies qui peuvent cibler l’agrégation de l’aSyn», déclare Alfonso De Simone, qui est le coordinateur du projet. Les chercheurs ont également mis en évidence le rôle de l’aSyn dans la déficience mitochondriale qui peut conduire à la maladie de Parkinson. Ils ont également montré le mécanisme par lequel l’aSyn intervient dans l’arrimage des vésicules synaptiques à la surface de la membrane plasmique, déclenchant ainsi la libération du neurotransmetteur. «Cette découverte montre que l’aSyn, la protéine responsable de la maladie de Parkinson, joue un rôle important dans la communication neuronale dans des conditions normales», note Alfonso De Simone.
Les découvertes jouent un rôle dans le diagnostic et le traitement de la maladie de Parkinson
Les résultats du projet BioDisOrder ont déjà un impact important dans le monde de la médecine. Alfonso De Simone lui-même travaille actuellement sur un nouvel outil de diagnostic de la maladie de Parkinson, tandis que les recherches menées dans le cadre du projet sont utilisées dans une série de collaborations pour la découverte de médicaments avec divers groupes de l’UE, de la Corée du Sud et des États-Unis. On espère que ces lignes de recherche permettront d’identifier de nouvelles thérapies potentielles pour le traitement de la MP. Toutes les recherches menées dans le cadre du projet ont été publiées dans diverses revues scientifiques de premier plan, tandis que les méthodes biophysiques ont été mises à la disposition de la communauté scientifique. «Il n’y a pas de limites à la caractérisation des processus biomoléculaires», conclut Alfonso De Simone. «Si vous introduisez une méthode dotée d’une nouvelle capacité analytique, vous pouvez résoudre des problèmes que l’on pensait autrefois impossibles à caractériser.»
Mots‑clés
BioDisOrder, régions protéiques intrinsèquement désordonnées, maladie de Parkinson, troubles neurologiques, protéines, maladies neurodégénératives, cancer, microscopie électronique, alpha-synucléine, médecine