Des biocapteurs au service du diagnostic du cancer de la vessie
En dépit des avancées technologiques, les méthodes traditionnelles, comme les essais ELISA, sont couramment utilisées dans la pratique clinique du diagnostic du cancer. Cependant, ces méthodes sont longues et caractérisées par une faible sensibilité, ce qui exige de faire appel à d’autres solutions cliniques pour le dépistage précoce chez les personnes présentant un risque élevé de développer un cancer. Les scientifiques participant au projet BlaC E-assay, financé par l’UE, ont proposé de mettre au point des biocapteurs, des dispositifs communément utilisés dans des applications biomédicales, pour détecter des molécules très spécifiques présentes dans les échantillons biologiques. Afin de détecter la molécule cible, les biocapteurs ont recours à des biorécepteurs, tels que les anticorps, les oligonucléotides ou les enzymes, qui produisent un signal comme de la chaleur, de la lumière ou une variation de pH. Un transducteur convertit l’évènement de bioreconnaissance en un signal électrique ou optique proportionnel aux niveaux de la molécule mesurée. Les biocapteurs électrochimiques sont fréquemment utilisés pour la surveillance à domicile des niveaux de glucose chez les diabétiques ainsi que pour le suivi de l’environnement, la sécurité alimentaire et la découverte de médicaments. L’objectif du projet BlaC E-assay était d’élaborer un système de diagnostic point de service fiable pour le cancer qui intègre des technologies des microfluides et de l’électrochimie. Un biocapteur innovant pour la détection de biomarqueurs Si les capteurs électrochimiques existants promettent une utilisation facile, une précision et une sensibilité élevées, ils sont souvent handicapés par des problèmes tels que les bruits de fond, la non-spécificité et la non-sélectivité dans les échantillons cliniques. Étant donné que la sélectivité est la caractéristique la plus importante d’un biocapteur pour le diagnostic, les scientifiques ont choisi avec soin les molécules de bioreconnaissance. «Le système BlaC E-assay est une plateforme générique qui peut être adaptée à une batterie de tests de diagnostic, pour autant qu’un élément de bioreconnaissance intervienne, comme un anticorps ou un aptamère d’ADN», explique le docteur Estrela, coordinateur du projet. «Nos efforts se sont concentrés sur la détection de plusieurs biomarqueurs de protéines du cancer du sein et de la vessie», poursuit-il. Afin de pallier l’instabilité des anticorps, les scientifiques se sont intéressés à d’autres éléments de bioreconnaissance, tels que les aptamères oligonucleotides synthétiques. Ces éléments prennent la forme de simples brins d’ADN ou d’ARN et sont conçus pour se fixer sur des cibles spécifiques, notamment les protéines. L’appareil de paillasse BlaC E-assay comprend des chambres distinctes dédiées à l’essai et à la détection présentant une chimie de surface innovante et une conception microfluidique, associées à des techniques de détection électrochimiques. Bien qu’ils n’aient pas été testés dans un environnement clinique, les échantillons de sérum sanguin commercial enrichi aux biomarqueurs en question ont donné des résultats très prometteurs. Le biocapteur BlaC E-assay a fonctionné avec précision et a donné des résultats reproductibles. Les chercheurs ont examiné plus en profondeur la sensibilité et la résolution du dispositif. L’environnement clinique exige des biocapteurs pour démontrer une haute sensitivité de détection de molécule à des concentrations de ng/ml. Par ailleurs, ils doivent proposer une résolution suffisante pour pouvoir répondre de manière proportionnelle aux niveaux d’analytes. Le futur des biocapteurs dans le diagnostic des maladies Malgré les vastes travaux de recherche effectués au cours des 50 dernières années, les biocapteurs disponibles sur le marché sont extrêmement limités, à l’exception des tests de grossesse (immuno-chromatographiques sur bandelette) et des biocapteurs électrochimiques à glucose. Parmi les problèmes rencontrés par les applications cliniques à vocation commerciale, citons la difficulté de rassembler des équipes issues de différents domaines, la traduction de la recherche universitaire en prototypes viables sur le plan commercial et la résolution de questions complexes en matière de législation. L’avenir des biocapteurs dans le diagnostic biomédical s’annonce radieux grâce aux nanomatériaux innovants et aux technologies de microfabrication. La niche d’applications du diagnostic des maladies est en constante expansion et il ne fait aucun doute que l’avènement des biocapteurs contribuera au diagnostic de nombreuses maladies. Sur la base de la preuve de principe, le docteur Estrela espère obtenir un financement supplémentaire pour construire un prototype qui peut être miniaturisé et promu auprès du secteur en vue de sa commercialisation.