Comment les plantes de lin et leurs pollinisateurs favorisent la diversité dans les écosystèmes méditerranéens
La biodiversité représente la capacité de la vie à s’adapter et à évoluer dans un contexte de changements globaux. L’évolution des organismes sous l’effet de la sélection naturelle exercée par d’autres organismes est l’un des principaux moteurs de la biodiversité. Cette dynamique est illustrée par la relation entre les fleurs et leurs pollinisateurs. L’adaptation des organes reproducteurs des angiospermes à la forme et à la taille de leurs pollinisateurs est un élément central de cette interaction, qui contribue à sa réussite. Dans le cadre d’une étude visant à montrer comment les caractéristiques reproductives des fleurs et les organismes pollinisateurs agissent ensemble pour maintenir la biodiversité dans les écosystèmes de type méditerranéen, le projet FLAXMATE a utilisé le lin comme modèle en raison de sa grande diversité au sein de ces environnements. Le projet a été financé par le programme Actions Marie Skłodowska-Curie.
De nouvelles connaissances sur les facteurs qui déterminent les interactions entre pollinisateurs et favorisent la pollinisation croisée
Un vaste travail de terrain en Afrique du Sud et en Europe a permis aux chercheurs d’identifier les espèces de pollinisateurs associées aux plantes de lin. «Nos résultats ont révélé que le système de pollinisation d’une espèce influence considérablement l’évolution de son phénotype d’accouplement», explique Juan Arroyo, coordinateur du projet. À plus grande échelle chez les angiospermes, des analyses similaires ont montré que l’hétérostylie, et les polymorphismes de longueur de style qui y sont liés - lorsque les fleurs ont des hauteurs réciproques d’organes reproducteurs mâles (étamines) et femelles (pistil) pour encourager la pollinisation croisée - est liée à des traits floraux spécifiques et aux comportements des pollinisateurs. «Ces éléments se combinent pour favoriser un transfert précis du pollen sur le corps du pollinisateur», note Juan Arroyo. «Grâce à une analyse comparative de toutes les angiospermes, nous avons découvert que ces polymorphismes floraux sont beaucoup plus répandus chez les angiospermes que ne l’avaient montré des études antérieures. Ces résultats valident également l’hypothèse darwinienne selon laquelle les pollinisateurs sont capables d’interagir avec des variations de style spécifiques (différences dans les structures reproductives de la fleur), ce qui renforce l’efficacité de la pollinisation croisée», ajoute le chercheur.
De nouveaux indices sur les mécanismes de pollinisation en jeu
Les résultats précédents concernant le comportement des pollinisateurs chez les angiospermes impliquent également que la structure et les caractéristiques de la fleur influencées par l’hétérostylie déterminent la manière dont le pollen est déposé sur des parties spécifiques du corps du pollinisateur. Cela maximise les chances que le pollen soit effectivement transféré à une autre fleur de la même espèce, améliorant ainsi l’efficacité de la pollinisation croisée. Pour mieux comprendre l’interaction entre le lin et ses pollinisateurs, l’équipe a mené des expériences en utilisant des points quantiques comme étiquettes de pollen. Ces expériences ont démontré que les grains de pollen sont déposés sur des parties spécifiques du corps des pollinisateurs, correspondant aux phénotypes d’accouplement des fleurs. De nouvelles mesures quantitatives ont également été élaborées pour évaluer la précision de la pollinisation au sein de populations présentant différents phénotypes d’accouplement.
Étudier les facteurs qui déterminent la diversité et l’évolution du lin
Les analyses comparatives ont également démontré que les systèmes de pollinisation influencent fortement l’évolution des caractères d’accouplement, mais que ces caractères n’ont pas d’incidence directe sur la diversité du lin clade(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre). Pour approfondir leur compréhension de la diversité florale, les chercheurs ont effectué des analyses morphométriques géométriques afin d’évaluer quantitativement les phénotypes d’accouplement chez les espèces de lin. Une phylogénie HybSeq(s’ouvre dans une nouvelle fenêtre) a également été développée pour le lin jaune, en utilisant la collecte simultanée de données de gènes nucléaires à faible copie et de cibles génomiques à forte copie. Cette approche a permis de faire progresser les études phylogénomiques et de mieux comprendre les relations évolutives. Les chercheurs ont étudié les causes de l’évolution répétée des polymorphismes stylistiques chez les espèces de lin, un trait clé qui façonne leurs systèmes d’accouplement. L’équipe a également étudié l’influence de la répartition géographique sur les taux de diversification des lignées de lin. «Nos recherches ont permis d’apporter des éléments de réponse au déclin et à l’évolution des populations de pollinisateurs et d’élaborer des politiques environnementales européennes. En outre, étant donné que le bassin méditerranéen abrite la plupart des espèces de lin, les résultats sur les systèmes de reproduction et d’accouplement constituent des outils précieux pour les futurs programmes de sélection des cultures», conclut Juan Arroyo.