DÉFIS DE SOCIÉTÉ - Sécurité alimentaire, agriculture et sylviculture durables, recherche marine, maritime et dans le domaine des eaux intérieures, et la bioéconomie
DÉFIS DE SOCIÉTÉ - Sécurité alimentaire, agriculture et sylviculture durables, recherche marine, maritime et dans le domaine des eaux intérieures, et la bioéconomie
Objectif spécifique
L'objectif spécifique est d'assurer des approvisionnements suffisants en aliments sûrs, sains et de qualité et en autres bioproduits, en développant des systèmes de production primaire productifs, durables et efficaces dans l'utilisation des ressources, et en promouvant les services écosystémiques associés ainsi que le rétablissement de la biodiversité, parallèlement à des chaînes d'approvisionnement, de traitement et de commercialisation compétitives et émettant peu de carbone. Une telle démarche accélérera la transition vers une bioéconomie européenne durable, en comblant l'écart entre l'émergence de nouvelles technologies et leur mise en œuvre.
Au cours des décennies à venir, l'Europe sera confrontée à une concurrence croissante pour un accès à des ressources naturelles limitées, aux effets du changement climatique, notamment sur les systèmes de production primaire (agriculture, y compris élevage et horticulture, sylviculture, pêche et aquaculture), et à la nécessité d'assurer un approvisionnement alimentaire durable, sûr et fiable à la population européenne et à une population mondiale en augmentation. On estime que la production alimentaire mondiale devra augmenter de 70 % pour nourrir les 9 milliards d'habitants que comptera notre planète d'ici 2050. L'agriculture représente environ 10 % des émissions de gaz à effet de serre de l'Union et, si les émissions dues à l'agriculture diminuent en Europe, elles devraient, à l'échelle mondiale, enregistrer une hausse qui pourrait atteindre 20 % d'ici 2030. Qui plus est, l'Europe devra s'assurer un approvisionnement suffisant en matières premières, en énergie et en produits industriels générés de manière durable, dans un contexte de diminution des réserves d'énergies fossiles (la production de pétrole et de gaz liquide devrait chuter d'environ 60 % d'ici 2050), tout en maintenant sa compétitivité. Les biodéchets (qui représentent, selon les estimations, jusqu'à 138 millions de tonnes par an au sein de l'Union, dont jusqu'à 40 % sont mis en décharge) posent un problème considérable et génèrent des coûts colossaux, en dépit de leur forte valeur ajoutée potentielle.
On estime par exemple à 30 % la part des aliments produits dans les pays développés qui finissent par être jetés. De profonds changements s'imposent pour réduire ce chiffre de 50 % d'ici 2030 au sein de l'Union. En outre, les frontières nationales n'empêchent aucunement l'entrée et la propagation des ravageurs et des maladies qui touchent les animaux et les végétaux, dont les zoonoses, et des agents pathogènes présents dans la chaîne alimentaire. Si des mesures de prévention efficaces à l'échelon national sont indispensables, une action au niveau de l'Union est essentielle pour garantir un contrôle optimal et assurer le bon fonctionnement du marché unique. Le défi est complexe, concerne une grande variété de secteurs interconnectés et exige une approche globale et systémique.
Une quantité sans cesse croissante de ressources biologiques est nécessaire pour satisfaire la demande du marché en produits alimentaires sûrs et sains, en biomatériaux, en biocarburants et en bioproduits, qui vont des produits de consommation courante aux produits chimiques en vrac. Les capacités des écosystèmes terrestres et aquatiques nécessaires à leur production sont cependant limitées; leur utilisation fait l'objet de projets concurrents et, souvent, leur gestion n'est pas optimale, comme le montrent par exemple la baisse considérable de la teneur en carbone et de la fertilité de certains sols et l'épuisement des stocks de poissons. S'il est possible de développer les services écosystémiques fournis par les terres agricoles, les forêts, les eaux marines et les eaux douces en intégrant des objectifs agronomiques, environnementaux et sociaux dans une production et une consommation durables, ce potentiel reste sous-exploité.
Le potentiel des ressources biologiques et des écosystèmes pourrait être utilisé de manière beaucoup plus durable, efficace et intégrée. Ainsi, le potentiel de l'agriculture en matière de biomasse, de la sylviculture et des flux de déchets d'origine agricole, aquatique, industrielle et urbaine pourrait être mieux exploité.
Il est fondamentalement nécessaire d'assurer une transition vers une utilisation optimale et renouvelable des ressources biologiques et vers des systèmes durables de production primaire et de transformation, capables de produire davantage d'aliments, de fibres et autres bioproduits tout en limitant au maximum la consommation de ressources, l'impact environnemental et les émissions de gaz à effet de serre, en développant les services écosystémiques, en ne produisant pas de déchets et en répondant aux besoins de la société. L'objectif est de mettre en place des systèmes de production alimentaire qui consolident, renforcent et alimentent la base de ressources et qui permettent une production durable de richesse. Il importe de mieux cerner et d'améliorer la manière dont nous produisons, distribuons, commercialisons, consommons et réglementons les produits alimentaires. Pour réaliser cette transition, en Europe et au-delà, il est essentiel de lancer d'ambitieux programmes de recherche et d'innovation et d'en assurer l'interconnexion, ainsi que de nouer un dialogue permanent entre le monde politique, la société, les sphères économiques et les autres parties prenantes.
Justification et valeur ajoutée de l'Union
L'agriculture, la sylviculture, la pêche et l'aquaculture représentent, avec les bio-industries, les principaux secteurs à la base de la bioéconomie. Cette dernière représente un marché important et en expansion, d'une valeur estimée à plus de 2 000 milliards d'euros. En 2009, elle employait 20 millions de personnes au sein de l'Union, ce qui représente 9 % du total des emplois. Les investissements dans les activités de recherche et d'innovation au titre de ce défi de société permettront à l'Europe de devenir un acteur de premier plan sur les marchés concernés et contribueront à la réalisation des objectifs de la stratégie Europe 2020 et de ses initiatives phares «Une Union de l'innovation» et «Une Europe efficace dans l'utilisation des ressources».
Une bioéconomie européenne pleinement opérationnelle, couvrant la production durable de ressources renouvelables issues des milieux terrestres, de la pêche et de l'aquaculture, leur transformation en produits alimentaires, en aliments pour animaux, en fibres, en bioproduits et en bioénergie, ainsi que les biens publics connexes, générera une forte valeur ajoutée de l'Union. Parallèlement aux fonctions afférentes au marché, la bioéconomie assure également un large éventail de fonctions liées à la production de biens publics, à la biodiversité et aux services écosystémiques. Gérée de manière durable, elle peut réduire l'empreinte environnementale de la production primaire et de la chaîne d'approvisionnement dans son ensemble. Elle peut en renforcer la compétitivité, accroître l'autonomie de l'Europe et fournir des emplois et des débouchés commerciaux essentiels pour contribuer au développement des zones rurales et des zones côtières. Les défis liés à la sécurité alimentaire, à l'agriculture, à l'élevage, à l'aquaculture et à la sylviculture durables et, globalement, à la bioéconomie sont d'envergure européenne et mondiale. Il est essentiel d'agir au niveau de l'Union pour constituer des pôles, en vue d'atteindre les dimensions et la masse critique nécessaires pour compléter les efforts réalisés par un seul État membre ou par des groupes d'États membres. Une approche fondée sur la participation d'une multitude d'acteurs permettra les indispensables interactions, sources d'enrichissement mutuel, entre les chercheurs, les entreprises, les agriculteurs/producteurs, les consultants et les utilisateurs finaux. Une action au niveau de l'Union s'impose par ailleurs pour que ce défi soit relevé de manière cohérente dans tous les secteurs, en veillant à établir des liens étroits avec les politiques concernées de l'Union. La coordination des activités de recherche et d'innovation au niveau européen promouvra et contribuera à accélérer les changements nécessaires dans l'ensemble de l'Union.
Les activités de recherche et d'innovation recouperont un vaste éventail de politiques de l'Union et d'objectifs connexes, et en soutiendront l'élaboration, notamment la politique agricole commune (en particulier la politique de développement rural et les initiatives de programmation conjointe telles que «Agriculture, sécurité alimentaire et changement climatique», «Un régime sain pour une vie saine» et «Des mers et des océans sains et productifs») et le partenariat d'innovation européen «Productivité et développement durable de l'agriculture», le partenariat européen pour l'innovation concernant l'eau, la politique commune de la pêche, la politique maritime intégrée, le programme européen sur le changement climatique, la directive-cadre sur l'eau, la directive-cadre «Stratégie pour le milieu marin», le plan d'action sylvicole de l'Union, la stratégie thématique pour la protection des sols, la stratégie de l'Union en matière de biodiversité à l'horizon 2020, le plan stratégique pour les technologies énergétiques, les politiques industrielles et d'innovation de l'Union, les politiques extérieure et d'aide au développement, les stratégies phytosanitaires, les stratégies relatives à la santé et au bien-être des animaux, et les cadres réglementaires visant à préserver l'environnement, la santé et la sécurité, à soutenir une utilisation efficace des ressources et la lutte contre le changement climatique ainsi qu'à réduire la production de déchets. Une meilleure intégration de l'ensemble du cycle allant de la recherche fondamentale à l'innovation dans les politiques connexes de l'Union améliorera sensiblement leur valeur ajoutée européenne, produira des effets de levier, renforcera l'intérêt qu'elles présentent pour la société, permettra de fournir des produits alimentaires sains et contribuera à promouvoir la gestion durable des terres, des mers et des océans et les marchés relatifs à la bioéconomie.
Afin de soutenir les politiques de l'Union liées à la bioéconomie et de faciliter la gestion et le suivi de la recherche et de l'innovation, des activités de recherche socio-économique et de prospective seront menées en lien avec la stratégie relative à la bioéconomie, comprenant notamment le développement d'indicateurs, de bases de données et de modèles, des travaux d'anticipation et de prévision, ainsi qu'une analyse de l'impact des initiatives sur l'économie, la société et l'environnement.
Les actions axées sur les défis qui mettent l'accent sur les avantages socio-économiques et environnementaux, sur la modernisation des secteurs liés à la bioéconomie et sur les marchés sont soutenues au moyen d'activités de recherche pluridisciplinaires, qui favorisent l'innovation et conduisent au développement de stratégies, pratiques, produits durables et processus nouveaux. Ces activités portent sur l'innovation au sens large, couvrant aussi bien l'innovation technologique, non technologique, organisationnelle, économique et sociale que, par exemple, les modalités des transferts technologiques, modèles d'entreprise, stratégies de marque et services innovants. Il y a lieu de reconnaître le potentiel que représentent les agriculteurs et les PME en termes de contribution à l'innovation. L'approche de la bioéconomie tient compte de l'importance des connaissances locales et de la diversité.
Grandes lignes des activités
(a) Agriculture et sylviculture durables
L'objectif est de fournir en suffisance des aliments pour les hommes et les animaux, de la biomasse et d'autres matières premières tout en préservant les ressources naturelles, telles que l'eau, les sols et la biodiversité, dans une perspective européenne et mondiale, et en renforçant les services écosystémiques, notamment en s'efforçant de lutter contre le changement climatique et de l'atténuer. Les activités viseront à augmenter la qualité et la valeur des produits agricoles en mettant en œuvre une agriculture plus durable et plus productive, y compris des systèmes d'élevage et de sylviculture qui soient diversifiés, résistants et efficaces dans l'utilisation des ressources (en termes de faible émission de carbone, de faible apport extérieur et de consommation d'eau), protègent les ressources naturelles, produisent moins de déchets et puissent s'adapter à un environnement en transformation. Elles seront en outre axées sur le développement des services, des concepts et des politiques qui aideront les populations rurales à prospérer et elles viseront à favoriser une consommation compatible avec le développement durable.
Dans le domaine de la sylviculture en particulier, l'objectif est de produire de la biomasse et des bioproduits et de fournir des services écosystémiques de façon durable, tout en tenant compte des aspects économiques, écologiques et sociaux de ce secteur. Les activités seront axées sur le développement de la production et de la durabilité de systèmes sylvicoles qui soient économes en ressources et de nature à renforcer la résilience des forêts ainsi que la protection de la biodiversité, et qui puissent répondre à la hausse de la demande de biomasse.
En outre, on prendra en considération l'interaction entre les plantes fonctionnelles, d'une part, et la santé et le bien-être, d'autre part, ainsi que l'exploitation de l'horticulture et de la sylviculture pour le développement de la place du végétal dans les villes.
(b) Un secteur agro-alimentaire durable et compétitif pour une alimentation sûre et saine
L'objectif est de répondre aux demandes des citoyens, qui recherchent des aliments sûrs, sains et à prix abordable, ainsi qu'aux besoins environnementaux, de renforcer le caractère durable des activités de transformation, de distribution et de consommation des produits destinés à l'alimentation humaine et animale et d'accroître la compétitivité du secteur de l'alimentation tout en tenant compte des aspects culturels liés à la qualité des aliments. Les activités se concentrent sur la production d'aliments sûrs et sains pour tous, sur la possibilité pour les consommateurs de faire des choix éclairés, sur des solutions et des innovations diététiques permettant d'améliorer la santé, ainsi que sur le développement de méthodes de transformation des aliments compétitives, nécessitant moins de ressources et d'additifs et générant moins de sous-produits, de déchets et de gaz à effet de serre.
(c) Exploiter le potentiel des ressources aquatiques vivantes
L'objectif est de gérer, d'exploiter de manière durable et de préserver ces ressources de façon à maximiser les retombées et les bénéfices économiques et sociaux générés par les océans, les mers et les eaux intérieures de l'Europe tout en protégeant la biodiversité. Les activités se concentrent sur la meilleure façon de contribuer à la sécurité de l'approvisionnement en denrées alimentaires dans le contexte de l'économie mondiale, en développant une pêche durable et écologique, une gestion durable des écosystèmes fournissant des biens et des services ainsi qu'une aquaculture européenne compétitive et respectueuse de l'environnement, ainsi que sur la promotion de l'innovation marine et maritime grâce aux biotechnologies, en vue d'alimenter une croissance intelligente et «bleue».
(d) Des bio-industries durables et compétitives et une aide à la création d'une bioéconomie européenne
L'objectif est de promouvoir des bio-industries européennes à faibles émissions de carbone, qui soient économes en ressources, durables et compétitives. Les activités visent à promouvoir la bioéconomie basée sur la connaissance en transformant les processus et les produits industriels conventionnels en bioproduits économes en ressources et en énergie, en développant des bioraffineries intégrées de deuxième génération ou d'une génération ultérieure, en optimisant l'utilisation de la biomasse issue de la production primaire, y compris des résidus, des biodéchets et des sous-produits des bio-industries, et en assurant l'ouverture de nouveaux marchés en soutenant les systèmes de normalisation et de certification, ainsi que les activités de réglementation, de démonstration/d'essai en plein champ et autres, tout en prenant en considération les implications de la bioéconomie sur l'utilisation des sols et les changements en la matière, ainsi que les avis et préoccupations de la société civile.
(e) Recherche marine et maritime à caractère transversal
L'objectif est d'augmenter l'effet des mers et des océans de l'Union sur la société et la croissance économique grâce à l'exploitation durable des ressources marines ainsi qu'à l'utilisation des différentes sources d'énergie marine et aux très nombreux modes d'exploitation des mers.
Les activités se concentrent sur les enjeux scientifiques et technologiques transversaux dans le domaine marin et maritime en vue de libérer le potentiel des mers et des océans pour tous les secteurs industriels marins et maritimes, tout en protégeant l'environnement et en veillant à l'adaptation au changement climatique. Une approche stratégique coordonnée pour la recherche marine et maritime à travers tous les défis et priorités d'Horizon 2020 soutiendra également la mise en œuvre des politiques concernées de l'Union afin de contribuer à atteindre les objectifs clés en matière de croissance bleue.